Ordell Robbie | 2.5 | Ladies Vengeance |
Où l'on doit trouver dans le charme d'époque des raisons de défendre un film d'exploitation nippon loin de peser cinématographiquement autant que les sommets du genre signés Suzuki Norifumi, Hasebe, Fujita ou Ito. Petit flash back d'abord. A la fin des années 60, la TOEI était LE studio spécialiste du yakuza eiga. Pour faire face au déclin du ninkyo au Box Office, une parade afin de ramener le spectateur male en salles à coup d'érotisme, de tortures et de jolies filles fut alors pour la TOEI le genre pinky violence. Le producteur maison Shundo Koji avait néanmoins vu au début des seventies dans les jitsurokus de Fukasaku un moyen de revitaliser le yakuza eiga au Box Office et croyait en leur potentiel commercial. Et en 1972 Okita le pourfendeur offrait les prémisses d'une formule couronnée de succès pour Fukasaku un an après. Criminal Woman: Killing Melody semble dès lors un produit intermédiaire entre le cahier des charges exploitation et un jitsuroku explosant l'année de sa sortie. Le pitch? De la jeune femme trouvant des complices de vengeance en prison en forme de Lady Vengeance avant l'heure. Du petit groupe de femmes d'action ne se départissant pas de sex appeal pré-Charlie's Angels la série. Et un personnage de vengeresse exploitant les rivalités entre clans yakuzas pour arriver à ses fins en forme de Yojimbo version revenge.
Tout ceci démarre donc sur les chapeaux de roue, les personnages féminins étant présentés à coup de vignettes/flash backs nous rappelant l'influence du manga sur le cinéma populaire nippon de l'époque. Chacune des membres du "commando" étant bien caractérisée par ses attitudes, son tempérament, son look empreint de sens du cool, le film évite en permanence le narrativement embrouillé. Et le petit plaisir du face à face entre deux stars du genre, Ike Reiko et Sugimoto Miki, n'est pas absent. Quelques idées bricolées ont ce petit charme d'époque qui fait la différence: le face à face de prison où chacune de deux des bad girls bastonne l'autre en tenant avec ses dents une corde confectionnée avec des bouts de tissus et où chacune peut montrer son caractère de tough girl ou encore ce yakuza usant de chewing gums comme armes de défense. Le cahier des charges du genre est également parfois présent (les mésaventures de mesdames donnent l'occasion de coucheries ou tortures) et le score est excellent.
Qu'est-ce qui cloche alors? D'abord des points intéréssants non développés par le script: l'ambiguité de la vengeance de l'héroine (venger un père qu'elle n'aimait pas vraiment) et celle du personnage de femme du parrain tiraillée entre compassion pour son amie prisonnière et désir que son mari soit épargné ne sont pas creusés. Et une mise en scène de Mihori Atsushi survolant certes le tout-venant occidental du genre mais pas brillante: cadrages corrects, réalisation oscillant entre planplan et clichés visuels d'époque pas transcendés (style sec caméra à l'épaule, gros zoom trop récurrent, usage de l'arret sur image pour présenter les personnages). Pour un produit d'exploitation se maintenant à flots plus par son charme d'époque que ses qualités intrinsèques.