Isao Takahata joue les prolongations écologiques de Mon voisin Totoro, noircissant le tableau en nous montrant avec cette fausse suite le combat que se livrent des p’tits Totoros - ici des ratons laveurs - et des humains qui auraient décidés de flinguer le camphrier géant – ici la forêt - pour en faire un bon gros immeuble bien grisâtre. Takahata perd en poésie ce qu’il gagne en tristesse concrète, l’efficacité du lance-pierre d’un lutin des bois ayant beaucoup de mal à zigouiller le béton des envahisseurs.
A l’inverse d’un « chambara » dont l’origine vient du bruit du sabre tranchant la chair (cham-cham, bara-bara !), « pompoko » est le bruit que fait le raton laveur lorsqu’il joue du tambour avec son ventre en signe de prospérité (pom-pom-poko-poko!). Porte bonheur pour les japonais, le tanuki est un peu leur nain de jardin à eux, quant à savoir s'il existe un "Front de Libération des tanukis", ça...
Le film Pompoko n’est pas parfait, il souffre de problèmes dans sa narration, des rebondissements foutraques qui risquent d’en rebuter certains. Les blagues des tanukis sont répétitives, le discours écolo est trop redondant et le métrage est finalement un peu trop long, peu aidé par une BO agressive et des bavardages nombreux. Le film manque surtout de passages planants et zens pour aérer son propos, une marque de fabrique plus souvent attribuée à Hayao Miyazaki. A la manière de ces tractopelles détruisant la nature, Pompoko nous martèle son message écolo sans temps mort, un bon point naissant de cette sensation d’inéluctabilité due à ces répétitions, les ratons laveurs ne faisant pas le poids malgré tous leurs nombreux efforts pour contrer des progrès humains qui nécessitent la disparition de nos chères bestioles. Comme par magie, les scories du film n’en sont alors plus, sous réserve que nous acceptions que le pamphlet écolo passe devant le divertissement immédiat, puisqu'en ressentant le travail de sape que subissent les tanukis, on ressent avec eux leur fatigue et l'usure d'un combat perdu d'avance.
Les indiens d’Amérique auraient pu remplacer les bestioles dans une version live, un parallèle parfaitement envisageable selon ces propos d’Isao Takahata : « (...) ils subissent aujourd’hui un sort comparable à celui des Amérindiens d’Amérique du Nord et des Indios d’Amérique du Sud. Ces races minoritaires parquées dans des réserves sont confrontées à la race dominante. Cela peut se traduire par des positions extrêmes comme le terrorisme ou encore par le refuge dans la religion. Les tanukis représentent ces minorités opprimées, et le film décrit les différentes voies qui s’offrent à eux » (1). Pas tout à fait, car il aurait fallu que les boloxes de ces peaux rouges soient aussi imposantes que celles de ces fiers petits guerriers à poils, les attributs indiens ne pouvant rivaliser avec ceux-là susceptibles de rendre honteux un vrai roc (oh si Freddy !), capables qu’ils sont de masquer la visibilité de tout le pare-brise d’un camion destructeur de leur ampleur virile, gracieusement offerte par dame nature. Et le vieux sage raton n’a même pas mal quand ses disciples marchent sur son tapis qui HOP ! se révèle être ses « testiculas mutantes » qu’il récupère illico presto sous le slibard pour épater la galerie. Faut s’imposer quand on est un vieux sage raton laveur hein…
Pompoko est un joyeux bordel coloré, triste mais optimiste dans sa noirceur, le tanuki n’ayant pas peur de la regarder bien dans le noir des yeux pour lui montrer qu’il aura toujours les couilles de lui faire la nique. Qu’ils y viennent, on les attend !! s'emballe alors un cinémasien s'identifiant un peu trop à ces bestioles, pour des raisons qu'il est inutile de développer ici.
(1) N° 425 de POSITIF – 1996, citation relayée par un dossier de presse disponible sur buta-connection.net (cf. lien)
Bon ça déchire, c'est hachement bien animé, la scène du carnaval, l'arrivée des anciens, le passage réaliste style jidaigeki sur la plage... Autant de scènes qui valent à elles seules le détour, autant d'aspects et bien d'autres à explorer dans Pompoko. Pour une autre fois...
TAKAHATA ne souscrit pas à l'animation "à la MIYAZAKI". Ce n'est pas une interprétation mais un fait. Là où MIYAZAKI orchestre des univers qui élèvent, grisent, transportent et déconnectent le spectateur de son quotidien, TAKAHATA n'a de cesse de le ramener au "ras des paquerettes", quitte à exploser quelques dents au passage. MIYAZAKI évoque un certain Japon "paternaliste" et apaisé de l'ère Showa avec Totoro ? L'année suivante TAKAHATA nous balance en pleine figure un Tombeau des Lucioles qui en est une antithèse dans le traitement... Plus proche thématiquement d'un Princesse Mononoke, sous ses airs de cousinage Pompoko s'en distingue pourtant fondamentalement par le choix de TAKAHATA d'aller au bout de la logique de son récit. Car ces deux films racontent avant-tout un affrontement dont on connaît "historiquement" le résultat, une guerre déjà perdue mais dont l'issue dramatique chez MIYAZAKI est pondérée par le destin de ses personnages principaux ainsi qu'une "belle" sortie, sur fond de bataille finale épique, d'une nature battue ; [SPOUALEUR] dans Pompoko il n'y a pas de personnages principaux auquels le spectateur puisse s'identifier, il n'y a pas de belle sortie finale pour les tanukis, il n'y a finalement que la défaite, l'obligation de sa cacher et, in fine, de "s'intégrer" pour survivre, en grapillant misérablement de petites occasions pour se "souvenir" d'avant, pour faire comme "avant"...[FIN DU SPOUALEUR] C'est en cela que TAKAHATA fait finalement montre d'une radicalité sans commune mesure chez MIYAZAKI, le film commençant dans la plus pure comédie écolo-fantastique pour progressivement se charger en drame à mesure que le "principe de réalité" prend le pas sur la fantasmagorie. Malgré leurs pouvoirs et l'aide des "anciens" (délicieux pastiche "DBZédien" au passage) l'histoire semble déjà écrite. Et implaccablement, consciencieusement, TAKAHATA nous ramène ainsi vers des horizons familiers, réduisant une à une les portes de sortie "merveilleuses" trop confortables. La fin de Princesse Mononoke est émouvante, celle de Pompoko est triste.
Ce film est vraiment une oeuvre magifique, comme seul le studio Ghibli et Takahata Isao peut le faire.
Comme toujours, les qualités techniques du film sont à la hauteur : l'animation, le dessin et la musique forment un triptyque des plus intéressants. Son intérêt réside principalement dans son scénario qui traite de la préservation de la forêt au regard de l'urbanisation intensive et dans son traitement qui utilise le regard des Tanuki, des ratons laveurs plutôt joyeux drilles. En effet, ils luttent pour conserver leur habitat avec des méthodes plutôt inhabituelles : attaques contre les chantiers, parades fantomatiques, ... N'écoutant que leur courage, ils se battent mais n'oublient jamais de faire la fête, ce qui nous les montre relativement humains ou du moins comme devraient être les humains : courageux, festifs et respectueux des anciens et de la nature. À travers cette histoire, Takahata Isao nous montre les dangers de l'urbanisme à tout prix, sans une prise en compte de l'environnement.
Pour conclure, ce magnifique film est au service d'une noble cause : la préservation de l'environnement. À ne manquer sous aucun prétexte.
On reconnaît bien dans ce Pompoko la patte de Takahata : le ton irrévérencieux proche de Mes voisins les Yamada, les élans poétiques du Tombeau des lucioles et le délire sur les roustons des tanukis qui fait penser au testicule du chat de Kie la petite peste… Dans ce conte écolo sublimé par une scène finale très émouvante qui montre combien l’urbanisation transforme irrémédiablement un paysage qui nous a été transmis du fond des âges, on rit beaucoup de cette équipe de bestioles aux pouvoirs magiques, capables de se transformer en Bouddha, en humains ou bien en spectres affreux terrorisant la population, on s’émerveille de l’inventivité des auteurs (une arche de Noé en roustons, fallait y penser…), mais on s’ennuie étonnement quelque peu devant la répétition des scènes de confrontation entre des tanukis condamnés à la disparition et des hommes qui détruisent tout sans l’once d’une hésitation, tant cela paraît évident pour leur évolution et pour leur sacro-sainte croissance économique. Une œuvre amusante, une œuvre à thème, mais qui manque de rebondissements.
Comme tous les Ghibli le dessin est sublime et la musique belle et dans le ton.
L'histoire tourne autour du thème de la nature envahie et détruite par les hommes, thème favori du studio (cf. Nausicaa de la vallée du vent, qui n'est pas l'oeuvre du studio mais l'oeuvre fondatrice, Mon voisin Totoro, Princesse Mononoke). Et comme nous y a toujours habitué Ghibli le résultat est un petit chef d'oeuvre!
La lutte de ces ratons pour préserver leur habitat, en plus d'être souvent drôle et de proposer des personnages intéressants, nous permet de nous poser quelques questions sur les rapports qu'entretient ou que devrait entretenir l'homme avec la nature. Bien sur même si le scénario et le thème sont bons, le film n'aurait pas une telle force sans la qualité exceptionnelle de la réalisation d'Isao Takahata. Des graphismes de toute beauté, en particulier lors de la parade des fantômes organisée par les ratons dans les rues de la ville la plus proche: inoubliable, grandiose, les laudatifs ne suffisent plus pour ces quelques minutes du film, digne des grands moments de Mon voisin Totoro (dans un genre très différent tout de même que la promenade sur le torse de Totoro).
Beaucoup plus intéressant, instructif et beau qu'une écolo parade! Un incontournable!