Première et unique réalisation de Johnny Mak, Long Arm of the Law jète un premier pavé dans la marre dans une société hongkongaise en crise. Produit par Sammo Hung, écrit par le vétéran "flic/guitariste/acteur" Philip Chan, le film suit la route de cinq chinois continentaux qui rêvent de se faire un peu plus d'argent que ne leur permet leur petite condition. Le plan: traverser la frontière, braquer les bijouteries de Hong Kong et revenir au pays avec assez d'argent pour vivre jusqu'à la fin de leurs jours. Bien évidemment, tout ne se déroulera pas comme prévu et l'issue leur sera fatale.
Difficile, dans un contexte social aussi embrasé que celui des années 80 à Hong Kong de ne pas se sentir touché par l'histoire de ces cinq amis chinois, pleins de rêves, qui pensent trouver la solution dans la facilité. Dans un contexte de relance économique de l'ère Deng Xiaoping et de dialogues préparant la rétrocession (qui sera signée fin 1984 soit quelques treize ans avant l'échéance), Mak dépeint le portrait d'une ville en proix au chaos. La cité se montre à l'opposé des personnages: moderne, furieuse et terriblement réfractaire aux immigrés illégaux. Le périple sera plein de danger ce que les personnages comprennent bien vite. Dès le début en fait, quant l'un des leurs ne parvient pas à passer le grillage de la frontière et finit criblé de balles et déchiqueté par les chiens de garde. Johnny Mak dépeint là un portrait social, urbain et quasi documentaire. La manière dont les "mainlanders" se font avaler par la ville de Hong Kong montre le soucis de réalisme du réalisateur et sa fascination pour les faits divers. Rappelons qu'il avait fait ses armes à la télévision en produisant des séries TV policières inspirées de faits réels.
La mise en scène de Mak se montre particulièrement furieuse. Il parvient à créer une tension de chaque instant en mettant la vie des personnages constamment en péril. La grande force du film est bien évidemment d'avoir su réveiller les gunfights à une époque où le polar hongkongais se montrait très social. Ici, point de mise en scène lyrique, ou de personnages magnifiés. Le tout se montre très hystérique et désespéré. Les scènes d'actions sont d'une violence et d'une noirceur viscérale qui renforce l'aspect dramatique, sans jamais tomber dans le pathos un peu mélo et tire larme. Filmées caméra au poing, la tension ne redescend plus au cours d'une scène d'action finale d'anthologie enchainant course poursuite en bagnole vs. hélicos de police puis gunfight dans la walled city.
Précurseur en son genre, Long Arm of the Law est l'un des regard les plus lucides portés sur la société HK pré-97 par le cinéma de Hong Kong. A la fois froid et cruel, mais aussi léger et humain, le film reflète un contexte de tension. Sans jamais verser dans le mauvais goût, ce classique de Johnny Mak représente le meilleur du polar social tout en apportant une touche d'action tout à fait cohérente. Une oeuvre qui sera suivie de trois suites également de grande qualité.
once upon a time in HK
Malgré un manque de moyens évidents, Jonnhy Mak arrive à faire passer dans ce film tout ce qui fera le succès des films de triades: relations d'amitiés, trahisons, les bas-quartiers de HK, une violence directe et simple sans être gratuite, flics et voyous prêts à tout. Tout y est, et malgré le temps c'est toujours à voir.
14 juillet 2003
par
jeffy
L'avènement d'un genre
Les débuts des années 80 marque l’arrivé tardive des polars dans l’industrie du cinéma de Hong Kong. Quelques années à peine avant les œuvres majeures d’un certains John Woo, certains réalisateurs prennent conscience de l’inexorable ascension du crime organisé, orchestré à Hong Kong par les triades. The Long Arm of the Lawfilm réalisé par Johny Mak en 1983, installe les bases d’un genre appelé naïvement plus tard par les critique Heroic Bloodshed (carnage héroïque).
Après une longue période dominée par les films de kung-fu et de Wu-xian-Pian (Films de sabres), ce formidable polar donne naissance à un nouveau genre et surtout permet à plusieurs réalisateurs de s’essayer dans un univers depuis longtemps américain.
Ecrit par Philip Chan, le scénario du film reste simple mais très efficace. Un groupe d’anciens soldats chinois décident de rentrer illégalement à Hong Kong dans le but de braquer une bijouterie. Sous les ordres de Tung , les membres de cette bande sont aveuglés par leurs espoirs d’une nouvelle vie sous le signe de la richesse. Lassé de leur pauvre condition de vie, ils sont prêts à tout pour y parvenir. Le film ne prend pas la peine de présenter chaque membre, en effet, dés le début du film, on découvre les préparatifs de leur expédition.
L’univers glauque du film est, dés le début, souligné par le metteur en scène : il pleut, il fait nuit et la demeure qui sert de quartier général aux truands n’est qu’une misérable bâtisse en bois. L’accent est d’ailleurs sur la différence entre la chine et Hong Kong, d’un côté on ne voit que plaine boueuses parsemées de grillages, de l’autre une ville étincelante grouillant d’activité et de vie. Un parallèle bien mis en évidence par Johnny Mak.
C’est pourtant dans ce « paradis » que le cauchemar se situe et ne cesse de croître jusqu'à un final incroyablement mis en scène : une poursuite mémorable dans les ruelles sombre de Kowloon. La mis en scène de Johnny Mak est vif et proche du documentaire, très proche par moment au style de Kirk WONG dans son Rockn’roll Cop.
The Long Arm of the Law focalise sur des personnages obligés de recourir à la violence pour parvenir à leurs but : commencer une nouvelle vie. Découvrant les joies de la mégalopole, Johnny Mak montre comment l’homme peut oublier tous principes moraux en se complaisant dans le vice. Plusieurs scènes du film prennent place dans des milieux ou prostitutions, alcools et autres drogues sont les principaux éléments. Dans ce film, il ne s’agit pas de voir des héros mais de dépeindre l’esprit corrompu de ces individus. Une vision noire qui pourtant laisse la place à une note d’espoir, représenté dans le film par ce rêve illustrant la vie passée de ses protagonistes.
Véritable précurseur des films de John WOO Yu-Sen, ce film présente tous les principes et aspect fondamentaux de l’œuvre du futur grand cinéaste. Des personnages croyant la fraternité, la loyauté (une phrase revient souvent dans le film : Ensemble nous formons qu’un !) la trahison, et bien sur ses fusillades d’une grande intensité. Un film visionnaire qui en fait une référence dans le cinéma de Hong Kong, à découvrir d’urgence.
Des rêves et du plomb dans la tête
L'approche du film est crue. Mise en scène, montage, narration tout concours à un ensemble des plus sérieux, sordide.
Si une petite poignée de passages comiques apparaît çà et là (la rupture de ton est courant à HK à cette époque), elles n'entravent aucunement la qualité globale du métrage.
Bien que peu nombreuses (deux véritables gunfights) les séquences d'action se présentent ici solides, celle clôturant le récit étant particulièrement réussi.
On sent l'investissement de l'intégralité du casting et un scénario préférant davantage faire parler les personnages que les flingues.
Les rôles sont assez subtilement écrit, évitant autant le manichéisme forcé que l'excès d'empathie, des deux coté de la loi.
28 juillet 2021
par
A-b-a
A l'origine...
Réputé pour être l'un des pionniers du heroic bloodshed, une vision de ce chef-d'oeuvre s'impose à tous ceux qui ne s'intéresseront que ne soit un tantinet à l'histoire HK, comme à tous les fans des polars intélligents.
Oeuvre parfaitement aboutie, en avance sur son temps et réalisé avec brio, "Long Arm of the Law 1" honore largement sa réputation.
Réalisé dans une urgence apparente, mais exploitant intélligemment ce handicap en choissant une caméra à l'épaule pounr une approche documentariste renforçant le côté véridique et exploitant lieux et lumières des lieux de la meilleure manière que ce soit, ce polar nerveux est bien plus qu'un polar efficace. S'attardant sur les personnages, mettant tranquillement en place les dernières heures des futures condamnés, le scénario exploite également les grandes différences culturelles entre chinois et hong-kongais. "Deux mondes complètement différents uniquement séparés par un pont" disait justement Fruit Chan en parlant de la menue séparation entre la Chine et l'archipel hong-kongais. Si l'on connait aujourd'hui l'étendue des différences culturelles, Mak les démontre avec brio dans son film. Que ce soit l'intrusion difficile en début du film vers une meilleure vie promise représentée par le scintillement des lumières de la ville de Hong-Kong (scintillements tels les diamants), que par la naïveté des personnages et leurs réactions burlesques face à des situations quotidiennes pour les HKais ou "occidentalisés" (emploi de la serviette humide dans le bar de nuit; le passage dans les WC). C'est également avec une candeur et innocence toute réaltive, que les amis vont aborder le braquage de la bijouterie, aveugles face à des signes, qui ne trompent pourtant pas : leur ami, exilé à HK, leur en met plein la vie avec des montres toc; leur cachette n'est rien qu'un petit motel miteux de passage; mai la petite bande se jete à corps perdus dans une société de débauche, ne pensant qu'à des lendemains riches facilement atteignables. On les sait condamnés d'avance et leurs galipeetes puérils sonnent fatalement comme leurs dernières heures.
Si le scénario est à l'avenant, la finale sera d'autant plus explosive. Fusillade gigantesque dans les ruelles étroites d'un bidonville (symbolisme du piège, dans lequel la bande s'enfonce dès le départ, un "coeur des ténèbres", l'on assiste, fasciné à la mise à mort d'un rêve inatteignable.
"Il n'y a pas de place pour les doux rêveurs, les opportunistes amateurs" semble vouloir dire le réalisateur. Mais il ne semble pas d'espoir pour personne dans la société : tous y meurent. Que ce soit l'indic, entre deux mondes, comme les méchants (les petites frappes), comme les bons (les flics, tombant sous les balles comme des mouches), comme les civils (pris pour otage et abbatus sans aucun remords). Un monde noir et désespéré, qui donne une des meilleures oeuvres du cinéma HK des années '80s. Et qui annonce véritablement la naissance du heroic bloodshed par ses thèmes (l'amitié, la trahison...), comme par ses figures (le tant célébré "tir pointé croisé" de John Woo apparaît dans toute sa splendeur dramatique et dramaturgique).
Film historique, mais un peu décevant
La réputation culte qui entoure ce film fait que les attentes sont lourdes. Pourtant, après avoir vu le superbe "men from the gutter", difficile de partager complètement l'enthousiasme général pour ce "long arm of the law" premier du nom.
Si le style sombre et froid de l'ensemble est très réussi, il faut avouer que le film est trop long, et que certaines qualités de départ, deviennent des faiblesses. Ainsi, Johnny Mak prend le temps d'installer son ambiance, de créer une complicité entre ses personnages, c'est qui est un des gros atouts. Mais en prenant trop son temps, la lassitude finit par s'installer, et le final, qui devait être d'une émotion incroybale, en patit considérablement.
S'il est évident que l'on n'est pas face à un film d'action, on regrette néanmoins qu'il se passe si peu de choses. Alors qu'un "one night in mongkok", sans être trépidant, réussit à nous faire ressentir l'angoisse de cette course-poursuite, ici il n'y a qu'à la fin que le suspense nous tenaille réellement. Le film aurait pu être trépidant sans rajouter une seule scène d'action, mais à trop vouloir installer l'ambiance, il n'y a plus d'émotion.
Les acteurs font leur job, en particulier celui qui joue Tung, qu'on retrouvera dans un rôle quasi-similaire, dans un film du même genre, nettement plus sous-estimé, mais aussi nettement plus prenant, le très bon "come from China". Cela fait d'ailleurs bizarre d'entendre le doubleur de Yuen Biao faire la voix de cet acteur. On a le plaisir de voir Ben Lam dans un caméo en flic énervé. Globalement, le jeu n'est pas mauvais, mais c'est sans grande prestation.
Finalement, le climax tant attendu, qui dure dix bonnes minutes, est hallucinant de maitrise, tant dans les cadrages, que dans le montage, et se révèle en effet l'atout principal du film. L'impression d'errer dans un labyrinthe, renforcée par le style caméra à l'épaule qui donne ici toute sa force à la situation, sonne comme un écho aux intentions du réalisateurs. L'envie d'autre chose, mais qui se perd dans un dédale d'événements, un peu comme le film, qui a force de trop faire durer, finirait presque par louper le coche. La fusillade qui s'ensuit est d'une intensité remarquable, et la tension entre les protagonistes ressort de fort belle façon. C'est bien ça le coup de force de "long arm of the law", nous rappeler en fin de métrage qu'on a assisté aux péripéties d'une bande d'amis qui s'est juré fidélité, et dont le destin est scellé dès qu'ils mettent les pieds à HK.
Cependant, cette excellente scène finale, si elle conclut magistralement le métrage, ne peut rattraper totalement un rythme trop peu maîtrisé, qui aurait pu être d'une intensité redoutable, et ce sans même ajouter de scène action. A trop vouloir faire monter la tension, on y perd.
Reste un film important à voir, sans oublier que "men from the gutter", sorti un an avant a forcément énormément inspiré Johnny Mak, mais très intéressant et ponctué par un final démentiel.
des qualités
polar bien sombre mais non dénué d'humour, très brut et sans fioritures, quelques baisses de régime alourdissent un peu l'ensemble mais le final arrache bien.
Polar Très noir et Très Bon !
Film d'importance Historique pour la suite des evènements à HK !
Un polar urbain hard boiled noir et précurseur : culte !
Voilà un des polars que j'avais envie de voir depuis que je m'intéresse au cinéma HK, le film jouit en effet d'un statut culte, et comment!
Le film possède un pitch assez classique mais est particulièrement agréable à suivre en raison non seulement de son statut précurseur mais aussi parce qu'il est globalement très réussi. Un scénario comique et tragique (le terrible sujet Chine/HK), une réalisation carrément efficace et immersive (plans simples, nombreuses utilisations de la caméra épaule, photo naturelle...). Déjà hard-boiled car quand même pas mal d'action dis donc, et bien sûr un climax final virtuose et anthologique.
On pense beaucoup à John Woo (relations d'amitiés et d'honneurs, fusillades superbes, le fameux mexican stand-off...) mais le style reste différent, plus noir encore et plus osé (scènes de sexe impenssables dans un Woo).
On oubliera certains défauts (en particulier acting parfois mauvais) mais difficile de bouder son plaisir devant un pionner du polar urbain de l'ex colonie.
14 novembre 2008
par
Hotsu
Ho'brothers...
Le gang O et ses élucubrations avec la naissance du style qui allait faire bien des émules dans l'ex-colonie, filmé tout en plans bruts, quasiment caméra à l'épaule, très documentaire finalement. Comme Scorsese filmait Mean Street et donnait à discerter à toute l'intelligentsia cinéphilique de Manhattan, Johnny Mak nous fait suivre la saga de ce gang qui ne peut que finir mal, forcément il est extrême, vit en permanence avec une arme. La scène de poursuites dans les ruelles étroites est un modèle du genre. Une référence.
Un film fondateur, une oeuvre clé du cinéma HK
Cet excellent polar très réaliste et bourré de tension n'a pas vieilli et était déjà très en avance pour son temps. John Woo s'en est forcément inspiré, tout comme Ringo Lam qui s'en ait de toute évidence inspiré pour "City on Fire". Un monument incontournable pour apprécier le polar façon HK.
Une fin anthologique qui doit rester dans la mémoire internationale
Je viens juste de visionner ce film et il est vrai que l'enfer des armes de Tsui Hark (que je trouve maintenant avoir surnoté), autre référence du même type (genre et historique) est un cran en dessous, bien que les deux réalisateurs n'aient pas les mêmes ambitions. Long arm of the law se présente comme un cocktail : on sent que l'effet va venir, mais il prend son temps et finit par surprendre. Le dernier 1/4 d'heure est mémorable, un concentré d'énergie qui rappelle effectivement les meilleures scènes de Mean Streets (dans le sens de l'énergie, après ca reste autre chose). Le film est excellent dans cet art de laisser le spectateur se prendre au jeu du "il y a de l'action mais pas trop" mélangé au côté socio-culturel qui finissent dans une apothéose cinématographique qui délaisse le fond pour mieux exploser (il faut voir ces quelques secondes où tout le monde tire sans savoir où et où le montage est virevoltant dans sa maîtrise du bordel). Bref, c'est un incontournable, pas seulement du cinéma HK, mais de tout le cinéma. Je ne concois pas qu'il ne soit pas encore distribué en France alors qu'on ressort Infernal Affairs en DVD. Qui plus est, cet aspect documentaire (caméra épaule prise souvent sur le vif + photo approximative) est souvent apprécié par le jeune public d'aujourd'hui. Ah, si tous les chef d'oeuvre pouvaient avoir un succès populaire en France, on n'en serait pas à glorifier le film de Guillaume Canet...Oups, désolé, mais sur 22 ans, je peux me permettre, non ?