La guerre est ouverte
Difficile de se positionner face à un tel film. Tout d'abord, il est clairement destiné à un public chinois. Wu Tianming lui même ne s'en cache pas, il a fait un film pour montrer au peuple chinois ce qu'il faut faire pour être à la hauteur dans la compétition mondiale. Pour cela, il suit l'exemple de Haier, une entreprise à présent mondialement connue dans le domaine de l'électro-ménager mais qui, il y a à peine 20 ans, n'était rien qu'une pauvre petite usine au bord de la faillite en Chine. Pendant toutes ces années, le patron de cet entreprise s'est mis face à toutes les barrières, et les a toutes renversées une à une, en prenant soin de ne pas se faire manipuler par les entreprises étrangères qui convoitent le marché chinois. Ce qui est frappant, dans CEO, c'est l'analogie quasi-totale avec la guerre. Rien qu'en voyant l'affiche, on distingue une pose héroïque du PDG en question avec, en plus petit et inférieurs, les étrangers qui sont lancés dans la bataille. Le récit n'est pas non plus exempt de ces références, tant les personnes n'hésitent pas à parler de "guerre économique" ou "guerre moderne" pour justifier le besoin de devenir puissant et agressif. Sans parler de la musique non moins héroïque à chaque fois qu'un problème est résolu. Tout ce système fait clairement passer le film à nos yeux comme une grosse oeuvre de propagande chinoise, mais d'un point de vue chinois, il faut reconnaitre qu'il s'agit là d'un problème très important, dans la mesure où le pays est constamment menacé par les désirs expansionnistes des grandes puissances. De plus, si l'on en croit Wu Tianming, il a cherché à coller le plus aux faits et à la personnalité du patron, évitant les exagérations et les caricatures. Néanmoins, il restera toujours surprenant de voir un entrepreneur français aller prendre dans ses bras des ouvriers chinois par enthousiasme, même si, parait-il, c'est vraiment arrivé.
En outre, CEO apporte une grande différence avec le reste de la filmographie de Wu Tianming. Alors que dans des films comme Le Vieux Puit, ou Life, il s'acharnait à montrer la vie des chinois, et plus particulièrement ceux de la région de Xi'an (où se situe son studio), CEO est totalement dénué de la moindre profondeur dramatique. Les personnages n'ont pas de personnalité et aucun personnage secondaire ne se démarque. Seul le PDG, sur lequel est centré l'histoire, montre quelques traits, pour bien décrire sa persévérance devant l'adversité, et son absence totale de doute. Cependant, on nous parle pendant tout le film de l'acharnement dont font preuve les employés chinois pour permettre à l'entreprise d'accéder au rang des grandes entreprises mondiales, mais on ne voit jamais ce travail. Ce ne sont que des paroles dans la bouches des chef et des managers. A coté de cela, on nous étale tout un essai sur l'économie, simplifié de manière à ce que le message passe efficacement pour tout le monde. Pas de grosse question complexe ; ici les problèmes sont bien séparés les uns des autres, un seul à la fois, expliqués clairement, et résolus de la même manière.
Finalement, CEO, tourné à l'attention d'un public exclusivement chinois, est difficile à juger sous un oeil totalement extérieur. Pour ma part, je n'ai pas vraiment été touché par son sujet ultra-nationaliste, mais apparemment, il a eu son gros succès en Chine.