Opéra des quat'seins
L'auteur de l'opéra huang mei original a dû se retomber plus d'une fois dans sa tombe en pensant aux adaptations cinématographiques de son œuvre.
La première, signée Chow Sze-loke en 1964, avait pour particularité d'avoir été scénarisée par un jeune premier du nom de…Chang Cheh. Le futur réalisateur phare de l'égérie Shaw Brother n'avait bien évidemment que faire du personnage principal de la jeune servante et concentrait l'entière action sur le ténébreux beau-frère.
Li Han Hsiang va encore plus loin et signe une adaptation fort coquine du matériau originel. La Shaw Brother, jamais avare en opportunités commerciales, ressuscite le temps de financer cette oeuvrette surfant en plein sur le récent engouement pour des fresques érotiques après le succès de la série "Sex and Zen".
L'intérêt d'une telle production reste bien évidemment limité et cherche avant tout à donner au spectateur pour son argent (et son attente plus ou moins pressé). Le film est donc parsemé de scènes coquines, souvent maladroitement intégrées dans le seul but de remplir le quota souhaité. En revanche, par rapport à une moyenne, cette version du "Lotus" ne contient pas seulement son beau lot de scènes véritablement érotisantes, mais également filmées de main de maître d'un réalisateur chevronné. Les décors et les costumes sont superbes (et étudiés dans le détail, jusqu'aux chaussures serrant très fort les pieds des demoiselles pour els réduire à forme de moignons – signe de "beauté" à l'époque) et la mise en scène rappelle furtivement les meilleures productions de la Shaw, nombreux zooms compris. Ce qui provoque comme une curieuse faille temporelle dans le cerveau du spectateur fan de ciné HK avisé…
En revanche, le scénario pèche malheureusement par son manque d'ambition à tenter de créer une vraie tension et à étoffer les personnages et leurs motivations; et le jeu des acteurs de seconde zone faillit de s'identifier pleinement à leur destinée forcément tragique.
Il n'empêche que côté moyens et réalisation, cette oeuvrette érotique se place indéniablement dans le haut des paniers des mêmes productions de l'époque.