C'est à peu près le sentiment qui peu a peu vous envahit à la vision de ce film délirant. Tourné la même année que The Odd One Dies, Too Many Way to be Number 1 en partage une certain humour, mais qu'il pousse beaucoup plus loin. Le film est presque un pastiche des films de gangsters, mais garde tout de même de temps en temps une petite touche de sérieux. Cependant, la majeure partie du film est une sacrée partie de rigolade. Fruit du collectif Milkyway Image, il se montre le plus déjanté des films du groupe pour ce que j'en ai vu.
Wai Ka-Fai, scénariste de The Odd One Dies, passe à la réalisation cette fois-ci, et se laisse aller à des plans complétement délirant, notamment avec des travellings circulaires assez cultes, ainsi qu'une scène la tête en bas. Le film est divisé en deux parties, les deux destins possibles pour le personnage de Lau Ching-Wan. Cela permet aux acteurs de livrer deux interprétations diamétralement opposées, notamment Lau et le toujours excellent Francis Ng.
Dans la première histoire Lau est le loser né, entouré d'autres losers quand même moins forts que lui. Il enterre leur chef avec son pager, ne sait pas conduire, j'en passe et des meilleures. Dans la deuxième histoire, c'est plutôt Francis qui hérite du rôle du loser, puisqu'il réussit à oublier le numéro de téléphone de son contact pour récupérer son contrat, puis promet n'importe quoi lors d'une beuverie. Lau est un peu moins paumé, mais se fait quand même mettre la main dessus par Carman Lee (un rôle au rabais une fois de plus, sniff...) et merdouille à nouveau plusieurs fois.
Les parallèles entre les deux histoires sont faciles à faire, Lau affrontant plus ou moins les mêmes situations mais ne réagissant pas de la même manière. Le scénario est donc assez original et surtout possède un sens de l'humour assez décapant, parfaitement servi par les deux têtes d'affiches qui sont assez exceptionnels dans leur multi-roles respectifs. Comme la réalisation se met à l'unisson et déjante complétement du début a la fin, on comprend vite qu'on est devant un film culte.
Entre The Odd One Dies (qui concours également pour le film avec le plus de doigts coupés) et celui-ci, mon coeur balance, les deux films font preuve d'un scénario solide (tragi-romantico-comique pour TOOD et tragi-très-comique pour TMWTBN1), d'une interprétation solide et d'une grande originalité dans leur réalisation. Peut-être même un peu trop pour Too Many Way..., on sent que Wai Ka-Fai n'a pas une grosse expérience. Je préfère à ce titre la réalisation de TOOD, mieux maîtrisée, ainsi que sa musique. TMWTBN1 rattrape cette différence par son ton délirant qui permet de faire passer n'importe quel type de plan.
Au final, c'est un peu Sonatine mixé avec Les Anges Déchus, de quoi vous étonner et vous faire rire pendant une heure et demi. En un mot comme en dix, culte.
Ce film est un régal. L’essence même du cinéma de Hong-Kong est contenue dans cette heure et demie prodigieuse, à savoir de la folie furieuse, de l’hystérie communicative, de l’humour ravageur et surtout le courage d’oser ce qu’on n’oserait pas ailleurs : filmer une scène de bagarre collective caméra à l’envers, couper des doigts comme de vulgaires saucisses ou encore se moquer ouvertement des triades… Pour cela, Wai Kai Fai s’est appuyé en premier lieu sur une mise en scène très originale et pour le moins radicale : son film est le plus souvent composé de plans-séquences dans lesquels la caméra vogue d’un personnage à l’autre, chose qu’on a rarement vu ailleurs que chez De Palma ! Là où d’autres s’évertueraient à multiplier les plans, Wai Kai Fai exprime bien plus en un seul et témoigne par la même occasion d’une exceptionnelle maîtrise technique pour son premier film. J’en veux par exemple pour preuve la scène de l’annonce de la mort quasi-simultanée des Brothers White et Blackie, véritable morceau d’anthologie.
Dans ce cadre formel particulier, les acteurs s’en donnent à cœur joie puisqu’ils possèdent une marge de manœuvre bien plus conséquente. On commence par Lau Chin Wan qui trouve là l’un des meilleurs rôles de sa carrière ; il bouffe littéralement l’écran de son talent et on a d’yeux que pour lui, d’autant plus que le scénario lui offre la possibilité de jouer sur plusieurs registres différents. Viennent ensuite un Francis Ng convaincant et surtout une énorme batterie de seconds rôles très enthousiasmante. L’intrigue en elle-même n’est pas banale et rappelle un film du polonais Kieslowski dans les années 80 intitulé Le Hasard : elle propose plusieurs options différentes d’un même destin en fonction des choix suivis par le personnage principal. C’est ainsi que TMWTBN1 est coupé en 2 parties distinctes mais cependant communes sur de nombreux points, montrant deux avenirs assez proches d’un petit caïd de seconde zone placé à un tournant de sa vie.
In fine, j’ai été vraiment emballé par ce film et je le reverrai sans aucun doute avec plaisir. Il n’est peut-être pas très célèbre, mais il vaut vraiment le détour.
J’avais ce film dans ma pile de vcd à voir depuis presque 2 ans, j’ai bien tenté de le regarder une fois mais il y avait tellement de bruit et de monde autour de moi que j’étais resté complètement hermétique à l’univers du film, j’avais préféré arrêter sa vision au bout de 15 min ! Car vous devez savoir que pour regarder Too Many… il faut être dans de bonnes conditions, et surtout (c’est très important) ne pas avoir mal au crâne.
En effet WAI Ka-Fai à la réalisation se lâche et la caméra virevolte dans tous les sens, ça peut paraître quelque peu déroutant au premier abord avant de se rendre compte que le réalisateur sait très bien ce qu’il fait en fin de compte. On ne sait jamais quel angle et quel cadrage seront pris au prochain plan, c’est vraiment jouissif : la caméra est en gros plan sur un visage, puis elle se retrouve au niveau des pieds du gars qui se trouve juste à côté, puis elle tourne au centre d’une table, … Ne vous inquiétez pas pour autant elle se pose parfois, nous permettant de nous reposer et ainsi encore mieux repartir après. Que ce soit lorsqu’elle est en mouvement ou fixe, la caméra nous offre certains plans de toute beauté et parfois vraiment originaux. La musique est belle, c’est un petit air qui revient tel un leitmotiv à la manière de The Mission quelques années plus tard.
J’ai oublié de parler de l’histoire, c’est celle de Kau (Lau Ching-Wan), petit truand, qui suivant sa manière d’agir effectuera un contrat soit en Chine Continentale, soit à Taiwan ; ces 2 possibilités nous sont montrées à la suite, avec leur dénouement respectif.
Pour le casting, c’est un spécial Johnnie TO Kei-Fung (producteur pour ce film) et j’en ai presque la larme à l’œil en l’énumérant : LAU Ching-Wan est le fil conducteur de l’histoire, impeccable dans son rôle, comme d’habitude ; Francis NG Chun-Yu en mafieux looser est parfait et trouve à chaque fois le ton juste. Du côté féminin, même si elles sont en retrait par rapport aux hommes,on a droit à Ruby WONG Cheuk-Ling (NdMoi : si tu lis cette critique, Ruby je t’aime) en veuve opportuniste et Carman LEE Yeuk-Tung auprès de notre bon Lau Ching-Wan. Au niveau des seconds rôles, CHEUNG Tat-Ming et Elvis TSUI Kam-Kong remplissent tranquillement leur fonction ; cependant on constate un énorme manque : où est notre bon Lam Suet :-(.
C’était vraiment l’époque bénite de la Milkyway Image où elle sortait des polars avec peu de moyen et des idées, Too Many… doit obligatoirement figurer dans votre vidéothèque auprès des autres polars de cette fabuleuse boîte.
Too Many… a une réalisation réellement originale et maîtrisée de manière impressionnante, en plus il possède un casting de choix, un scénario qui tient la route et auquel j’ai accroché ; bref un classique de plus à rajouter au CV du beau petit monde qui a participé à ce long métrage.